Une décennie tumultueuse

Les féniens

Peu de Canadiens d'aujourd'hui ont entendu parler des Fenians. Pourtant, ceux-ci semaient de sérieuses craintes chez nos ancêtres des années 1860 et ont fait bien souvent la une des grands quotidiens canadiens de l'époque. Il s'agissait d'une société plus ou moins secrète de patriotes irlandais immigrés aux États-Unis, désireux de promouvoir, par la force, l'indépendance de leur patrie assujettie à la Grande-Bretagne. À la fin de 1865, quelque 10 000 vétérans d'origine irlandaise de la guerre civile américaine appartenaient aux Fenians. Ils se divisaient en deux factions, l'une favorisant une insurrection en Irlande, l'autre voulant s'emparer du Canada-Uni pour l'échanger contre l'indépendance irlandaise ! Ils furent pris très au sérieux par les autorités canadiennes et britanniques, qui placèrent des espions au sein de leurs factions, et ce qu'ils découvrirent n'avait rien de bien rassurant. Les Fenians se composaient habituellement d'officiers et de soldats aguerris, semblaient bien organisés, avaient de l'argent et possédaient non seulement des fusils rayés mais aussi des carabines Spencer à sept coups se chargeant par la culasse, armes efficaces que personne ne possédait au Canada-Uni. En apprenant cela, le gouvernement canadien en commande immédiatement 300.

Les services secrets rapportent bientôt la possibilité d'une attaque le jour de la Saint-Patrice, de sorte qu'en mars 1866, le gouvernement canadien appelle 14 000 volontaires en service actif. Mais rien ne se produit et les volontaires canadiens sont démobilisés à la fin du mois. Néanmoins, en avril, un raid manqué des Fenians contre l'île Campobello, au Nouveau-Brunswick, sème l'inquiétude parmi la population et la rallie à la proposition d'unir les diverses colonies d'Amérique du Nord britannique en un seul pays.