La vie quotidienne en Nouvelle-France

Les soldats

L'horaire du soldat

Tambour des Compagnies franches de la Marine en Nouvelle-France, 1716-1730

Légende: Tambour des Compagnies franches de la Marine en Nouvelle-France, 1716-1730

Il est difficile de reconstituer la journée du soldat en Nouvelle-France. D'une part, il existe peu d'informations précises à ce sujet, et, d'autre part, l'emploi du temps pouvait varier grandement selon que l'on était en hiver ou en été, dans une ville ou dans un fortin, que le soldat logeait chez l'habitant ou à la caserne.

D'une façon générale, dès le point du jour, c'est-à-dire quand le soleil commence à poindre à l'horizon, les tambours battent La Diane. Dans n'importe quel fort ou caserne, on se lève, on endosse l'uniforme, on nettoie la chambre et on s'affaire à préparer le déjeuner que l'on consomme par groupes de sept. Il est encore tôt, vers les sept heures, quand le sergent passe pour inspecter et la chambre et les hommes, et pour donner les consignes du jour.

Il y a bientôt des soldats qui s'éparpillent dans toute la ville. Ceux qui doivent monter la garde se dirigent vers les points qui leur sont assignés et on peut les voir arpenter lentement les remparts. D'autres sont postés au corps de garde de chacune des résidences où une surveillance est requise. À Montréal, par exemple, quelques-uns font la sentinelle devant la porte du gouverneur de la ville ; à Québec, d'autres sont en faction devant celle du gouverneur général où il y aura, en plus, un tambour, car le protocole exige que l'on batte la caisse à chacune des entrées et sorties de ce dignitaire, comme pour un maréchal de France. Des sentinelles seront affectées également à la porte de l'intendant, ou du commissaire-ordonnateur, et à celle du trésorier. Pendant ce temps, sur le Champ-de-Mars, des soldats s'alignent pour pratiquer le maniement des armes sous la direction d'un sergent. Ici et là, des escouades gardent les prisonniers, ou surveillent les chantiers et les hôpitaux militaires. Quelques soldats ont, en outre, été requis pour prêter main-forte à la justice. Ils traversent la rue, accompagnant un archer de la maréchaussée qui s'en va arrêter un criminel...

Le tour de garde dure 24 heures consécutives, de midi à midi, et chaque soldat doit le faire un jour complet par semaine, sans compter les fois où un camarade demandera à être remplacé. Durant cette période, le soldat servira en tant que sentinelle pour une durée de quatre à six heures. En été, on le relèvera aux deux heures, et à toutes les heures en hiver, à cause du froid. Mis à part le temps qu'il passe à ce service, le soldat qui est en devoir doit se trouver au corps de garde. Il y couche, il y mange et, comme il doit toujours se tenir prêt, il y dort tout habillé.

En principe, on fait du maniement d'armes trois ou quatre fois par semaine, mais en pratique c'est un exercice que les officiers négligent, probablement parce qu'ils n'y voient guère d'utilité pour le genre de guerre que l'on mène au Canada. Au milieu du XVIIe siècle, l'insistance des autorités pour qu'on copie les usages de l'armée en France entraîne une amélioration à ce chapitre et à celui des parades.

En dehors des heures de garde et des périodes d'exercices, les hommes disposent de leur temps. La plupart travaillent chez un particulier ou à un projet public, à moins qu'ils n'exercent à leur compte quelque petit métier. Tout ceci leur procure un supplément de revenu qui est certes le bienvenu pour grossir leur maigre solde.

L'heure des repas se situe vers midi pour le dîner et entre 17 h et 19 h pour le souper, bien que cela puisse varier. À 20 h en hiver et 21 h en été, les tambours marchent dans la ville en battant La Retraite, qui correspond plus au moins au coucher du soleil. A ce signal, les militaires doivent regagner leurs quartiers, pour les uns, la maison de l'habitant, pour les autres, la caserne. Ainsi prend fin la journée du soldat. Elle peut sembler monotone, mais c'est sans compter les « divertissements »...