De la guerre froide à aujourd'hui

Les Réserves depuis 1945

Le rôle de la réserve

La Réserve de l'Armée canadienne est de loin la partie des Forces canadiennes qui a la plus grande profondeur historique. Sa tradition remonte directement au Régime français et elle a presque 300 ans d'histoire officielle, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Elle a été, depuis la Confédération, l'épine dorsale de l'effort de défense du Canada, ici même et outre-mer. Par ses effectifs, par son organisation très enracinée dans les petites localités comme dans les grandes villes, elle a été incontournable au moment des deux grandes mobilisations de ce siècle. Or, à compter de 1945, l'armée professionnelle canadienne tant décriée par les miliciens des XIXe et XXe siècles, va la supplanter grâce à l'arrivée de technologies qui forcent une révision en profondeur des stratégies et de l'utilisation des armées.

En 1946, la Milice a été plus ou moins restaurée dans son statut d'avant 1939. L'arme nucléaire existe déjà, mais on en ignore toutes ses possibilités. Par exemple, est-ce qu'une armée qui se bâtit sur environ deux ans à partir de presque rien (comme après 1914 et 1939) peut être encore utile dans un conflit qui se joue loin de ses bases ? Bien vite, on saura qu'une guerre totale pourrait être terminée avant qu'une telle armée « en devenir » puisse être utilisée.

En 1952, le chef de l'état-major général, le lieutenant général Guy Simonds, qui vient de vivre la création rapide de deux brigades d'infanterie destinées respectivement à la Corée et à la République fédérale allemande, conclut que la Milice ne peut répondre aux attentes soulevées par de soudaines crises. Les guerres risquent d'être courtes et très techniques. Pour les conduire, il faudra des professionnels surentraînés et toujours prêts à entrer en lice. En Europe de l'Ouest, où le Canada maintient une brigade à compter de 1951, il s'agit d'arrêter toute invasion dès les premières semaines de son déclenchement. Dans ce cas, à quoi sert l'organisation de la Milice en six divisions ?

En 1953, Simonds, ayant obtenu l'appui de la Conférence des associations de la Défense, confie à une commission l'étude d'une réforme de la Milice, en fonction de sa raison d'être et de son coût d'opération. Dans son rapport déposé en avril 1954, la commission recommande l'élimination des divisions et des brigades (avec leurs quartiers généraux) et celle de la plupart des défenses côtières et des batteries antiaériennes. Le nombre d'unités blindées croît (de 18 à 22) et celui des unités d'infanterie diminue (de 66 à 54).

Les normes d'entraînement restent les mêmes, mais on donnera plus de temps aux réservistes pour les atteindre. On jumellera les unités de réserve à des unités de la Force régulière durant une semaine ou deux chaque année.