Un siège interminable
Le rejet de certains volontaires
On a ouvertement parlé au Canada d'une guerre entre hommes blancs. On entend par là que le sport consistant à tuer un ennemi de race blanche doit être réservé aux Blancs. Au Canada, ce sont les commandants locaux qui acceptent ou refusent les volontaires. Dans les premiers jours, seuls les autochtones sont explicitement exclus, sous prétexte que dans les aléas du combat, les Allemands pourraient leur refuser le traitement habituellement réservé aux combattants « civilisés ». Cela n'empêche pas plusieurs commandants, conscients ou pas de cette directive, d'accepter des autochtones, et certains d'entre eux se feront ensuite toute une réputation, en particulier à titre de francs-tireurs.
Cependant, les membres de groupes plus visibles, comme les Noirs des Maritimes, ou les Asiatiques et les Indiens de la Colombie-Britannique, qui se présentent par centaines à divers centres de recrutement, ne peuvent participer à cette guerre de Blancs. En 1915, on écarte les propositions d'un bataillon de Canadiens d'origine nipponne et d'un autre composé d'hommes de race noire. Pourtant, le bassin de volontaires blancs s'épuise déjà.
Même si aucune directive discriminatoire n'existe, il est clair qu une politique de discrimination a été appliquée. Des offres visant à créer des compagnies formées de Noirs ou d’Asiatiques échouent, mais on en viendra à intégrer deux compagnies autochtones au sein d'un bataillon qui recrute surtout en Ontario. Finalement, en 1916, un bataillon de travailleurs noirs est créé, le N° 2 Construction Battalion (Coloured), qui sera encadré par des Blancs et dont le seul o acier noir sera l'aumônier auquel on a donné le grade de capitaine honoraire.
À compter de l'été 1916, les problèmes de recrutement s'étant intensifiés, le ministère prône enfin une politique d'ouverture, mais le racisme n'étant pas le seul apanage des Blancs, des problèmes surgissent. Ainsi, les autochtones font clairement savoir qu'ils ne veulent pas servir au sein du N° 2 Construction Battalion, qui manque d'hommes. Ils ne veulent, à la guerre, côtoyer aucun Noir. Deux ans après le début du conflit, la ferveur guerrière s'est estompée. Aucun des bataillons levés à compter de 1916, y compris le N° 2 Construction Battalion, n'arrivera à combler ses cadres. Le bataillon ne sera jamais plus qu'une grosse compagnie de 500 hommes commandés par un major plutôt que par un lieutenant-colonel.
Quant à la conscription de 1917, elle s'applique à tous, sauf aux autochtones qui ne manquent pas de rappeler qu'ils sont encore privés du droit de vote. Les Nippo-Canadiens, qui n'ont pas davantage le statut de citoyen à part entière, réclament le même privilège d'exemption. La Loi des Indiens servira à exempter les autochtones, alors qu un décret du 17 janvier 1918 exemptera japonais et Indiens.
Malgré ces obstacles, on a établi comme suit la participation de ces groupes à la Première Guerre mondiale : 3 500 autochtones, 1 000 Noirs et 600 Nippo-Canadiens.
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