Un siège interminable
La dernière année
Le dernier souffle
En 1918, les pays qui luttent depuis quatre ans en Europe sont à court de combattants. Les Russes ayant renoncé à poursuivre le siège qu'ils menaient contre les Allemands sur le côté est, ces derniers peuvent concentrer leurs efforts à l'ouest. Ils doivent agir vite, car les Américains se mobilisent depuis avril 1917 et des dizaines de milliers d'entre eux arrivent en Europe. En principe, les Allemands peuvent opposer 192 divisions aux 173 dont disposent les Alliés au printemps de 1918. La valeur des divisions est inégale de part et d'autre. L'amélioration des moyens techniques et tactiques, combinée au manque d'hommes, permet aux Britanniques de réduire de quatre à trois le nombre de bataillons formant les brigades. Désormais, avec neuf bataillons, plutôt que 12, le nombre des divisions britanniques, australiennes et néo-zélandaises a augmenté alors que l'effectif dans chacune a diminué du quart.
En agissant de la même façon, et en portant au front sa 5e Division, en attente en Grande-Bretagne, le Canada aurait disposé de six divisions et il aurait pu se doter d'une armée de deux corps. Currie décide plutôt de garder intacte la structure de ses quatre divisions. Ce faisant, il refuse une promotion presque assurée. Après Passchendaele, il démembre la 5e Division, ce qui lui permet de reformer les cadres des quatre autres et d'ajouter 100 hommes à chaque bataillon d'infanterie. Il renforce également les ingénieurs-sapeurs qui auront trois bataillons de 1 000 hommes chacun, avec leur commandement propre et leur logistique. Cette dernière mesure devrait permettre aux fantassins et aux artilleurs de se concentrer sur le combat. Au printemps 1918, chaque division canadienne dispose de son bataillon de mitrailleuses lourdes avec 1 558 hommes et 96 Vickers qui s'ajoutent aux mitrailleuses Lewis de plus en plus nombreuses parmi les pelotons d'infanterie.
À la fin de la guerre, le Corps des mitrailleurs canadiens est formé de 422 officiers et de 8 349 hommes. Mais on se demande encore aujourd'hui si cette immense puissance de feu était plus efficace que la brigade d'infanterie supplémentaire que ces spécialistes auraient pu former ? Il n'en demeure pas moins qu'une division d'infanterie canadienne de 24 000 hommes en compte 6 000 de plus que les autres formations de l'Empire britannique et 4 000 de moins que les américaines.
Armés de confiance, Currie et ses hommes n'hésitent plus à agir ouvertement selon leurs convictions. Le Corps d'armée canadien, à l'image de Currie d'ailleurs, est, au sein des formations britanniques, un géant sûr de lui. Même si, au printemps 1918, Currie est en position défensive, il résiste aux sollicitations des Britanniques désireux de s'adjoindre une ou deux divisions qui leur permettraient de mettre un terme à certaines attaques allemandes.
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