Un siège interminable
La mobilisation
La première phase de la guerre et la mobilisation au Canada
Légende: Bombardement allemand d'Arras, en 1914
Selon les plans de l'Allemagne, l'attaque qui s'appuie sur un large mouvement d'enveloppement des armées françaises, doit sceller le sort de la France en six semaines. Après avoir envahi la Belgique, l'aile marchante allemande progresse dans le nord-est de la France. Objectif : prendre Paris et enfermer les combattants français entre cette aile et le mur à peu près immobile constitué en Alsace-Lorraine. Le plan ne se déroule pas comme prévu. La retraite des Français a lieu, mais dans l'ordre et ponctuée de coûteuses contre-attaques. Les Allemands rétrécissent donc la zone d'envahissement en passant à l'est de Paris. Ainsi découvert, le flanc allemand est la cible d'une attaque restée célèbre, la bataille de la Marne, qui oblige les Allemands à céder une partie du terrain conquis. S'ensuivent de mutuelles tentatives de débordement qui ne font pas de vainqueur immédiat, mais qui permettent de libérer une grande partie de la France envahie et un petit secteur de la Belgique. Bientôt, entre la frontière suisse et la mer du Nord, deux lignes de tranchées s'affrontent.
La guerre de mouvement, amorcée au mois d'août, se transforme, vers la mi-octobre, en une guerre de siège, au cours de laquelle les puissances centrales sont les places fortes à investir.
Le Canada, qui n'a pas eu le temps d'intervenir au cours du premier épisode du conflit, a néanmoins jeté les bases de sa participation aux événements qui vont suivre. La Loi de la Milice de 1904 prévoyait que le gouverneur en conseil pouvait mettre en service actif une partie ou la totalité de la milice, soit au Canada, soit hors du pays. Préparés en conformité avec les vues britanniques, les plans de mobilisation de 1911 prévoyaient que, dans des circonstances jugées critiques par son gouvernement, le Canada pouvait envoyer un contingent composé d'une division d'infanterie et d'une brigade montée se battre dans un pays du monde civilisé, comme on disait à l'époque, et ayant un climat tempéré.
Ces plans sont toutefois enveloppés de tant de mystère que Sam Hughes, ministre de la Milice et de la Défense depuis 1911, en ignore l'existence jusqu'en 1913.
À cette époque, la milice active est la plus considérable que le Canada ait pu former en temps de paix : 59 000 hommes se sont entraînés et on prévoit hausser leur nombre à 64 000, en 1915. Acheté par le gouvernement canadien, le camp de Petawawa accueille près de 34 000 hommes au cours de l'été 1914. Les exercices d'entraînement ont souvent lieu devant un parterre de belles dames qui ont répondu à l'invitation d'officiers.
Que pensaient du cirque des camps d'entraînement les huit millions de Canadiens ? Évoquant, en 1943, la faune de miliciens réunis au camp de Lévis avant 1914, l'abbé Alphonse Fortin raconte qu'à son avis, comme à celui de plusieurs, les miliciens s'entraînaient à « des exercices indéterminés qui ne rappelaient rien aux hommes mûrs de ce temps-là. Les Canadiens avaient vécu si longtemps dans la paix qu'ils avaient même perdu le souvenir d'une tradition militaire [...]. Nous avions l'impression d'une milice sur le papier, de cadres fantaisistes - pour tout dire : une sorte de gaspillage 64 »
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