La vie quotidienne des soldats et des officiers
Les soldats
Les épouses de soldats
Légende: Le départ du soldat « billetté», vers 1790
À la fin du XVIIe siècle, les femmes peuvent accompagner les soldats outre-mer à raison de trois par compagnie, nombre qui s'élève à six durant le XVIIIe siècle. Elles sont transportées aux frais de l'armée et ont droit à leur ration car les autorités les jugent utiles pour lessiver, cuisiner et coudre. Certaines s'improvisent infirmières avant la lettre.
Bien entendu, un nombre beaucoup plus considérable de femmes vivent dans l'entourage de chaque régiment en garnison dans les îles britanniques, mais leur situation est précaire. La veille de l'embarquement des régiments pour un autre pays, les femmes de soldats se rassemblent pour une loterie où elles jouent leur sort. On place dans un chapeau une quantité de billets équivalant au nombre de femmes présentes. La plupart de ces billets portent la mention « Not to go » - ne partira pas - et le nombre prescrit, soit trois ou six par compagnie, selon l'époque, « To go » - partira. Seules les femmes qui tirent un billet « To go » sont autorisées à embarquer avec leurs enfants et à accompagner leur mari vers sa nouvelle destination.
Les autres restent sur le quai, avec leurs enfants, privées de ressources... Comme il est presque certain que ces familles ainsi séparées ne se reverront jamais, bon nombre d'épouses délaissées attendent tout bonnement l'arrivée d'un autre régiment afin de trouver un nouveau mari... Toutefois, cette solution engendre aussi des cas pathétiques, tel celui de cette Rachel Heap qui, croyant son mari décédé, se remarie à Halifax en 1802 et donne le jour à trois enfants quand, ô surprise ! son époux « mort » resurgit. D'autres femmes, le cœur brisé, tentent de retourner dans leur famille, qui ne les accueille pas toujours, car on les considère souvent comme déshonorées pour avoir suivi des soldats. Certaines sombrent dans l'alcoolisme et la prostitution. Il y a même des cas de suicide, tant du côté des femmes que de certains soldats qui ne peuvent supporter l'idée de ne jamais revoir l'être aimé.
Celles qui parviennent à suivre les soldats doivent posséder un tempérament très vaillant, car il leur faut travailler dur pour arriver à survivre dans des conditions à peine concevables de nos jours. Et pourtant, nombre d'entre elles préfèrent cette existence à celle, encore plus épouvantable, des plus démunis de la société civile d'alors. Auprès d'un régiment, elles connaissent une vie certes difficile, mais trouvent aussi une certaine gaieté, de l'amusement et une vie sociale, bref une sorte de « famille élargie » souvent plus chaleureuse que tout ce qu'elles ont connu auparavant. Sans parler de l'amour, bien entendu.
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