Une décennie tumultueuse

Le retrait des troupes britanniques du Canada

Officier d'infanterie britannique en hiver, 1873

Légende: Officier d'infanterie britannique en hiver, 1873

Plus rien ne s'oppose donc au retrait de la totalité des troupes régulières britanniques du Canada, comme le désire ardemment le gouvernement de Londres. D'ailleurs, malgré les protestations canadiennes, les diplomates britanniques négocient déjà avec les Américains afin de régler tous leurs différends et parviennent à une entente globale qui sera signée le 8 mai 1871 : le traité de Washington.

L'année précédente, déjà, la garnison britannique a été retirée de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve. Plusieurs officiers supérieurs britanniques incitent le gouvernement canadien à lever une petite armée régulière pour remplacer les troupes déjà parties ou en instance de départ, mais sans résultat. Jusqu'au printemps de 1871, celui-ci ne croit pas au retrait complet de la garnison britannique et garde bon espoir qu'au moins un bataillon sera laissé à Québec, ce Gibraltar de l'Amérique du Nord, symbole de la puissance britannique. Londres a pourtant signifié très clairement que seules ses deux bases navales d'Halifax et d'Esquimalt seraient conservées pour la Royal Navy, et qu'une garnison ne serait maintenue qu'à Halifax.

À mesure que s'effectue le rapatriement des troupes, le gouvernement britannique remet toutes les propriétés et tous les magasins de fournitures militaires, d'armes et d'artillerie de l'armée régulière au gouvernement canadien. À l'automne de 1871, il se prépare à faire de même à Québec. Les autorités canadiennes se résignent enfin et, le 20 octobre, émettent un ordre pour lever deux unités d'artillerie régulières canadiennes afin d'occuper le fort Henry à Kingston et la citadelle de Québec, et pour placer des détachements aux forts de la pointe de Lévy et à celui de l'île Sainte-Hélène, à Montréal. Ces troupes doivent désormais dispenser la formation et l'instruction aux corps d'artillerie volontaire. Rien n'est prévu pour les fantassins et la cavalerie...

Dans l'après-midi du 11 novembre 1871, les officiers et soldats du 60e régiment, du Royal Artillery et des Royal Engineers sortent de la citadelle de Québec et du Parc de l'Artillerie en grande tenue et défilent pour la dernière fois dans les rues, marchant de la haute-ville à la basse-ville tout en chantant « Auld Lang Sye » et « Good-bye, Sweetheart, Good-bye ». Au quai, en présence d'une grande foule qui les acclame et leur souhaite bon voyage, ils embarquent sur le navire-transporteur de troupes Orontes, qui glisse ensuite lentement sur le Saint-Laurent alors que le crépuscule tombe. Une grande page de l'histoire militaire canadienne vient d'être tournée...