La vie quotidienne en Nouvelle-France

Les soldats

La promotion

On sait quel effet bénéfique peuvent avoir sur le moral les galons, les insignes et les médailles décernés officiellement et quel motif de fierté ils peuvent être. Pourtant, l'usage de ces distinctions ne s'est généralisé que récemment. Avant les années 1760, en effet, l'uniforme ne comportait rien qui indiquât les nombreuses années de service ou le mérite au combat du porteur. Quant à l'attribution de médailles, c'est un phénomène qui date essentiellement du XIXe siècle, alors que s'est répandue l'habitude de commémorer de cette manière les campagnes auxquelles le militaire avait participé ou les services qu'il avait rendus. Au XVIIIe siècle, seuls les officiers pouvaient éventuellement se voir décerner la croix de Saint-Louis.

Avant ces innovations, la seule récompense possible pour le soldat qui s'est signalé au combat réside à peu de chose près dans la promotion au grade supérieur, bien qu'elle l'oblige alors à assumer davantage de responsabilités. Être promu est un genre de reconnaissance du mérite de celui qui en est l'objet et atteste de ses longs états de service. La solde en est accrue. Ainsi, le soldat promu anspessade touche 36 livres de plus par année, et celui qui atteint le rang de sergent gagne 162 livres de plus que lorsqu'il était sans grade. Ces montants sont bruts et, certes, les déductions augmentent à mesure que l'on « prend du galon », mais au total cela représente quand même un gain net.

Au rang de sergent, il est difficile cependant de s'absenter pour aller travailler, car les détails du service militaire tiennent continuellement occupé. Comme « la plupart sont mariés » et pères de famille nombreuse, ils ont recours pour subsister au même stratagème que leurs pairs dans l'armée métropolitaine : leurs femmes tiennent cabaret pour « vendre du vin et autres boissons » 84 aux soldats.